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nombre de huit cents. Je fis marcher des troupes dessus. Le général Kléber se chargea, par mon

    Rossignol. — Oui, le représentant du Peuple (*. Esnuë la Vallée.) et moi, nous vous avons mandé pour avoir des renseignements certains sur les moyens, sur les intentions, sur les correspondances de votre parti. Vous n’ignorez pas ce que la loi prononce sur votre sort : vous n’avez plus rien à espérer ni à craindre, et les lumières que vous nous donnerez peuvent encore être utiles à votre pays. Quel a été le résultat de votre dernier conseil tenu à Blain ?

    Talmont. — Vous n’êtes pas sans doute dans l’usage de divulguer les plans de campagne que vous arrêtez dans vos conseils ; nous sommes généraux l’un et l’autre, et vous savez comme moi ce que nous devons au secret de nos opérations.

    Rossignol. — Général comme vous !… Vous combattiez pour la tyrannie, et je commande aux soldats de la liberté et de la raison. Savez-vous qui je suis ?

    Talmont. — Sans doute un homme à talents, qui devez votre élévation à votre courage et à vos lumières.

    Rossignol. — Vous me flattez. Je suis compagnon orfèvre.

    Talmont. — Cela n’est pas possible.

    Rossignol. — C’est aussi vrai que vous étiez ci-devant prince de Talmont.

    Talmont. — Je le suis encore.

    Rossignol. — Laissons cela. Quel était le but de l’armée soi-disant catholique ?

    Talmont. — L’armée catholique combattait pour son roi, pour l’honneur et le rétablissement des anciennes lois de la monarchie.

    Rossignol. — Quoi ! c’était pour servir un maître que vous répandiez tant de sang, que vous ravagiez tant de pays !

    Talmont. — Chacun de nous avait servi avec distinction, et nous préférions la tyrannie d’un seul, puisque c’est ainsi que vous l’appelez, à celle de six cents hommes, dont les passions, l’orgueil et l’immoralité font de leur patrie un théâtre d’oppression et de carnage, où personne n’ose énoncer librement son opinion, et où il n’est pas une seule famille qui n’ait à regretter un père, un frère, un ami. Vous-même, général, vous que la fortune et la guerre couronnent en ce moment, croyez-vous échapper à la faux de