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vèrent ma réflexion et il fut décidé que, séance tenante, je ferais parvenir une lettre au président. Le lendemain j’écrivais au président et ma lettre fut lue. Bourbotte monta à la tribune et dit toutes les vexations qu’il avait éprouvées de la part de ses collègues ainsi que ma destitution[1]. À

  1. CONVENTION NATIONALE  : Extrait de la séance du 28 août 1793 présidée par Robespierre.

    Bourbotte  : Citoyens, j’arrive à l’instant de la Vendée, pour vous parler de la destitution du général Rossignol et de nos collègues Goupilleau et Bourdon  : c’est une mission dont les représentants Merlin, Michet, Choudieu et Richard m’ont chargé.

    Lorsque le général Rossignol reçut la nouvelle de sa nomination au commandement en chef de l’armée des Côtes de la Rochelle, son premier sentiment fut de refuser ce grade, qu’il craignait de ne pouvoir remplir d’une manière utile pour sa patrie  ; mais il en fut empêché par plusieurs braves citoyens, qui lui firent sentir que son refus aurait peut-être de grands inconvénients, en ce que le commandement pourrait tomber entre les mains de quelque intrigant qui ne balancerait pas à l’accepter, afin d’avoir les moyens de trahir facilement  ; et les mêmes personnes qui lui donnèrent ce conseil l’encouragèrent encore davantage, en lui promettant de l’aider de toute leur bienveillance, de leur zèle, activité et conseils  ; ils lui jurèrent d’être autour de lui autant de surveillants fidèles  ; bref, ils le déterminèrent à accepter. Sa nomination, à la vérité, déplut beaucoup à quelques officiers intrigants et royalistes  ; mais les soldats trop lâchement trahis en plusieurs circonstances, ces braves guerriers, qui redoutent moins l’ennemi que la perfidie des chefs, virent avec moins de chagrin que les officiers un général sans-culotte à leur tête.

    Après avoir visité les postes avec ce général, nous nous rendîmes à Chantonnay ; mais à peine nos collègues jetèrent-ils les yeux sur moi ; ils ne répondirent à mes empressements fraternels que par le silence le plus profond. Ne pouvant deviner les motifs d’un semblable procédé, je leur fis connaître l’objet de ma mission, et j’eus beaucoup de peine à me faire écouter un instant. À peine