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Je partis pour faire ma tournée du côté des Sables, Niort, Fontenay-le-Peuple, etc[1]. J’étais accompagné du représentant Bourbotte. Je visitai toutes les colonnes qui étaient sous mes ordres  ; je parlai à tous les généraux le langage républicain, en leur disant qu’il fallait que toute ven-

    quait l’instruction qu’on doit exiger d’un général en chef. Aussi hésita-t-il longtemps avant d’accepter ce commandement… C’est une justice que je me plais à lui rendre, et il n’accepta, si je puis m’exprimer ainsi, qu’à son corps défendant. Il est non moins vrai que, si la Commission des représentants réunie à Saumur ne s’y opposa point, c’est qu’on lui laissa pour chef d’état-major le général Berthier, qui depuis a été le major général des armées de Napoléon. Le premier soin de Rossignol fut de défendre aux généraux divisionnaires de tenter aucune expédition isolée, sans en avoir reçu l’ordre ; mais l’insubordination était telle, que plusieurs généraux firent des mouvements imprudents.

    Philippeaux, qui était passablement fanfaron et qui n’a jamais paru à la tête d’une colonne pendant tout le temps qu’il a passé à l’armée, écrivait modestement à l’Assemblée : « Tout a changé de face depuis mon arrivée en ces lieux. » Quelques jours après, il vint nous faire une visite à Saumur. Je me permis de lui dire que je voyais avec plaisir arriver parmi nous un nouveau César, et que ce n’était point assez d’avoir écrit à la Convention nationale que tout avait changé de face depuis son arrivée, qu’il eût dû lui dire comme le vainqueur des Gaules : Veni, vidi, vici ; et j’ajoutai, peut-être un peu trop ironiquement, que c’était sans doute par modestie qu’il n’avait pas permis aux cent trompettes de la renommée de publier ses nombreux exploits, mais que j’espérais qu’il nous les raconterait lui-même avant de partir. Philippeaux, que nous avions invité à dîner avec nous, nous quitta à l’instant même et partit sans nous dire adieu Aussi me fit-il l’honneur, dans plusieurs pamphlets qu’il a publiés contre ce qu’if appelle la Cour de Saumur, de m’en désigner comme le chef, quoique j’y résidasse rarement et seulement lorsque l’armée y rentrait, pour y prendre quelque repos. (Choudieu : Notes inédites sur la Vendée.)

  1. Le 19 août 1793.