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la vie de bohême

aimer un autre ?… C’est drôle, tout ce que vous me dites là, il me semble que je fais un mauvais rêve…

Durandin, remontant.

Passons la scène de folie.

Mimi.

Mon Dieu ! pourquoi donc êtes-vous comme ça après moi ? Qu’est-ce que je vous ai fait ?… (Elle tousse.)

Durandin.

Mais enfin, que diable ! vous deviez bien comprendre que ce n’est pas une position pour Rodolphe ; il ne peut pas rester avec vous toute sa vie !…

Mimi.

Toute ma vie, à moi, ça ne serait pas si long…

Elle tousse encore.
Durandin.

Qu’est-ce que ça veut dire ?

Mimi.

Tenez, monsieur, laissez-le-moi un mois encore, et puis il sera libre…

Durandin.

Un mois… fin novembre… Vous avez un billet à payer.

Mimi.

Non, monsieur, je n’ai pas de dettes… je n’en ai à payer qu’au bon Dieu !

Durandin.

Et l’échéance approche ? C’est très-sentimental… mais je ne crois pas à ces grandes phrases-là… Vous ne mourrez pas… ce sont les filles honnêtes qui meurent…

Mimi.

C’est affreux !… vous ne devriez pas me traiter ainsi… je ne l’ai pas mérité !… (Elle pleure.)

Durandin, à part.

J’ai été trop loin… je n’en viendrai jamais à bout comme ça… (Haut.) Voyons, mon enfant, parlons rai-