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LES NÉO-CLASSIQUES

l’auteur affectionne avec insistance : ce qu’elle a de beauté, ce qu’elle fait de bruit, ce qu’elle a de douceur, contre ce que la vie offre à mes ans d’ennuis [1].

Tout cela contribue à faire d’Ernest Raynaud un poète assez artificiel dont le talent se résume dans une alliance inégale d’archaïsme et de rhétorique, où la sensibilité voisine avec l’afféterie et dont l’originalité reste encore aujourd’hui contestable. Sa forme, il la prend avec Moréas à une époque que le maître condamnera plus tard. Ses impressions, parfois délicates [2], sont moins celles d’un poète que d’un homme du monde, les accès de rêverie d’un amateur extrêmement bien doué pour qui la poésie reste le jeu préféré [3]. C’est un pasticheur érudit qui aime les classiques et renvoie souvent des échos brillants de leur voix, mais qui n’a pas assez d’audace pour être tout entier lui, et faire, dans le néo-classicisme, œuvre vraiment personnelle.

Les mêmes remarques pourraient s’appliquer aux deux autres membres de l’Académie romane : Maurice du Plessys et Raymond de la Tailhède. Ces deux auteurs, dont l’œuvre est fort brève, ne laissent à la critique qu’un champ très limité. Tous deux, plus ou moins, sont passibles des mêmes remarques qu’Ernest Raynaud. Le premier, après avoir procédé du Verlaine des Fêtes galantes a tenté d’imiter, sans les atteindre, les fougueuses hardiesses de Pindare ; le second, « gentil esprit, l’honneur des Muses bien parées », ronsardise en vers mesurés et d’un souffle assez court. Ce sont l’un et l’autre des néo-classiques dont la réputation pâlit un peu devant la renommée des Indépendants.

  1. Poésies, p. 204 ; 21, 240 ; le Bocage, p. 101.
  2. Cf. la préciosité mélancolique de A Trianon (Poésies, p. 113) et de Versailles (Id., p. 93).
  3. Cf. le sonnet-préface de la première édition du Signe (1887).