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BERTHA ET ROSETTE

France. C’était compris qu’une lettre venue de France, c’était pour Bertha, et le garçonnet la lui remit sur le perron du presbytère.

Le Père Ballard n’avait guère dormi cette nuit-là. La prière pour ses parents, presque tous morts ; la prière pour les jeunes gens si exposés en ces temps de carnavals ; pour ceux-là des tranchées de France, toujours si exposés à la mort, expliquait son insomnie.

Il sembla à Bertha que le vieillard était encore plus grand et plus maigre que jamais.

Le bon Père qui avait 78 ans, reçut comme son enfant la fille de vingt ans. Il eut l’intuition d’une souffrance secrète et tout de suite il posa une question :

— Petite, as-tu bobo au cœur ?

Ce ne fut qu’un signe affirmatif, pour réponse.

— Une lettre de ton promis ? Ce ne peut être cela, puisque tu ne l’as pas lue.

Aucune réponse ne vint. Le vieillard comprit tout ce qu’il y avait de détresse dans ce cœur qui ne savait plus au juste sa position