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BERTHA ET ROSETTE

coteau qui faisait la grobe (cuisine), et les fèves au lard sentaient si bon que je m’en liche encore les babines.

Par malheur, ce n’était qu’un rêve. La réalité était toute autre : pas la moindre bouchée de nourriture.

Pour comble d’ennui, le bombardement de la tranchée voisine par l’artillerie française commençait par un coup d’essai portant trop loin, et se continuait par d’autres coups de canon de plus en plus précis.

Terrés dans leur trou, les deux Canadiens attendaient en silence. Qu’il fut long cet après-midi d’inaction !

Puis ce fut la nuit ; nuit noire et sans lune, comme les précédentes. Nos deux soldats ne savaient pas où ils étaient. Ce qu’ils savaient, c’est qu’ils étaient sans manger et sans boire depuis trente-six heures. Dans ces conditions mieux valait le mouvement et n’importe quel risque, que l’inactivité dans leur trou. Aussi il fut décidé sans discussion qu’ils essaieraient de gagner les lignes des alliés, au