Page:Barrès - Un jardin sur l’Oronte, 1922.pdf/204

Cette page n’a pas encore été corrigée

tu avec cette douleur ? Tu veux me faire mourir de chagrin. Je ne te cache rien. Il faut voir ce qu’étaient ces jardins pleins de cadavres, cette odeur de mort dans la forteresse, toutes les femmes folles du désir de vivre, suspendues à ceux qui voulaient bien d’elles et sollicitant avec terreur des furieux qui pouvaient devenir des sauveurs. Tu ne sais pas jusqu’à quel point personne ne se possédait plus. Mais lui ne m’a pas brusquée ; il a fait tout au monde pour me plaire ; il a su m’émouvoir. Je te croyais mort, j’étais tentée de mourir.

— Tentée de mourir ! Que n’as-tu alors, en fuyant avec moi, accepté de courir cette chance de mort ou de salut ?

— Mes pieds ne m’auraient pas portée vers la pauvreté et l’obscurité.