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parfois ardente passion ; mais maintenant le visage pâle et serré, immobile, inébranlable dans une sorte de sérénité sombre, elle se livrait à un rêve nouveau qu’elle opposait à son ami. Était-elle inquiète, fâchée, terrifiée ? C’était d’un autre ordre plus grave. On eût dit une âme décidée à faire son chemin toute seule, après avoir éprouvé le néant des amitiés et parentés dont jusqu’alors elle vivait. On eût dit un chef qui voyant l’impossibilité de faire rentrer des mutins dans l’obéissance ne s’abaisse pas en vains discours. C’était une Oriante qu’il n’avait jamais vue. Cet être d’une si prodigieuse vivacité était méconnaissable dans sa rêverie profonde. Mais s’il en souffrit, il ne s’en inquiéta pas. Avec naïveté, il mesurait combien ils s’aimaient, puisqu’elle