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nos soldats gisent à terre, mais soudain de cet amas de blessés et de cadavres, quelqu’un se soulève et saisissant à portée de sa main un sac de grenades, s’écrie : « Debout les morts ! » Un élan balaye l’envahisseur. Le mot sublime avait fait une résurrection.

J’ai désiré connaître le héros de ce fait immortel, le lieutenant Péricard. Voici ce qu’il me raconta :

« C’était au Bois-Brûlé, au commencement d’avril 1915. Nous nous battions depuis trois jours ; nous n’étions plus dans la tranchée qu’une poignée d’hommes harassés, complètement isolés avec une pluie de grenades sur nos têtes. Si les Boches avaient connu notre petit nombre ! Leur artillerie faisait rage. Un lieutenant (son nom m’échappe), qui était venu me soutenir et qui fumait sa cigarette en riant aux projectiles, reçoit une balle au dessus de la tempe. Il s’appuie au parapet, les deux mains derrière le dos, la tête légèrement inclinée. Par la blessure, le sang gicle avec