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d’héroïque ; mes derniers gants de couleur sont aux mains d’un pauvre pioupiou qui a froid). Je cherche en vain les mots qu’il faudrait pour vous dire la joie et l’émotion que m’a causées votre lettre arrivée le soir d’un bombardement terrible du pauvre village que nous occupons. Cette lettre fut reçue là comme un baume contre tous les énervements et les malédictions possibles. Cette lettre lue, le soir, — j’en demande pardon à votre modestie ! — aux officiers de mon bataillon, réconforta les plus abattus, après cette rude journée, et prouva à tous que le cœur des jeunes filles de France est tout simplement admirable de générosité.

» Donc, il est minuit. L’honneur et le bonheur que j’ai de commander ma compagnie depuis huit jours (mon capitaine ayant été blessé) me valent le plaisir de vous écrire à cette heure, de la tranchée où, par des prodiges d’astuce, j’ai réussi à allumer une bougie, sans que soit éveillée l’attention de ces messieurs