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mon socialisme procédait de là pour une large part.

Maintenant le vieux rêve puéril revit en moi plus ardent que jamais. Je suis reconnaissant aux chefs qui m’acceptent pour leur subordonné, aux hommes que je suis fier de commander, eux, les enfants d’un peuple vraiment élu. Oui, je suis pénétré de gratitude envers la patrie qui m’accepte et me comble. Rien ne sera trop pour payer cela, et que mon petit gars puisse toujours marcher la tête haute, et dans la France restaurée ne pas connaître le tourment qui a empoisonné beaucoup d’heures de notre enfance et de notre jeunesse. « Suis-je Français ? Mérité-je de l’être ? » Non, petit gars, tu auras une patrie et tu pourras faire sonner ton pas sur la terre en te nourrissant de cette assurance : « Mon papa y était et il a tout donné à la France ». Pour moi, s’il en faut une, cette pensée est la plus douce récompense.

Il y avait dans la situation des Juifs, surtout des Juifs allemands nouvellement immigrés, quelque chose de louche et d’irrégulier, de clandestin et de bâtard. Je considère cette guerre comme une occasion bien venue de « régulariser la situation » pour nous et pour nos enfants. Après ils pourront travailler, s’il leur plaît, à l’œuvre supra et internationale, mais d’abord il fallait montrer par le fait qu’on n’est pas au dessous de l’idéal national… (Lettres communiquées.)