Page:Barrès - Les Diverses Familles spirituelles de la France, 1917.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

admirables soldats que les nôtres ! disait-il, quelle beauté ! quel mépris de la mort ! comme le bon Dieu a dû bien les accueillir ! Si vous les aviez vus le 9 mai partir à l’attaque ! Qu’ils étaient beaux ! On m’avait mis au poste de secours, là-bas… Je ne voyais rien, je n’ai pu y rester, et quand j’ai vu mes enfants (le 79e) s’élancer si superbement et puis être fauchés, j’ai couru aux artilleurs… Je leur criais : « Mais plus vite, tirez donc plus vite ; vous ne voyez donc pas que ce sont mes gosses qui se font tuer ! ».

» Toute une heure ce prêtre fiévreux m’a raconté de bien belles histoires. Des histoires de blessés surtout : il insistait sur le mépris devant la mort des jeunes de vingt ans. Il me disait le mot de l’un d’eux après l’opération : « Gardez mon bout de bras en souvenir de moi, monsieur le major, quoique ce soit vraiment à la France et non à vous que je l’ai donné ! » Il insistait sur l’exaltation des blessés de ces journées