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tellement j’avais sur moi la sensation puissante de la protection de Dieu qu’il m’accorde pour vous et par vous mes admirables parents. De sorte que je n’ai eu aucun mérite à n’éprouver aucune hésitation à me jeter entre les balles et les obus ; je les voyais dévier autour de moi. Je n’ai d’ailleurs commis aucun acte de valeur, du tout, je m’empresse de le dire, je me suis contenté d’aller là me l’on me disait d’aller.

Trois jours plus tard, s’étant proposé pour conduire une reconnaissance, il pénètre dans le village de Bezange-la-Grande. Un jeune paysan lui conseille « de faire demi-tour ». Il répond : « Je suis chargé d’une reconnaissance, il faut aller plus loin… », et presque aussitôt il tombe frappé à la tête d’une balle explosible. Il avait dit à son père en le quittant : « La Lorraine, je vous la rapporterai ou j’y resterai. » Les habitants l’ensevelirent et le maire a pu faire parvenir aux parents la médaille de piété trouvée sur leur fils ; elle portait l’inscription traditionnelle ; « Tu aimeras l’Éternel. » Sur le papier qu’il avait préparé avant son départ et où il exprimait ses dernières volontés, il invoquait la parole sacrée : « Il chemina avec Dieu tous les jours de sa vie. Tout à coup on ne le vit plus parce que Dieu l’avait pris. » Et encore : « Pour moi, je sais que mon Rédempteur est vivant et qu’il me ressuscitera de la terre, et