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Le 9 mai 1915, c’est l’assaut. Il rassure ses hommes, les encourage : « Ne craignez pas : je tomberai dans les premiers, mais vous passerez. »

Un grand Christ qui, jadis, étendait ses bras sur la plaine, est là, à l’entrée de la tranchée ; les obus de l’ennemi lui ont arraché le bras gauche ; son bras droit semble montrer le ciel aux soldats qui vont mourir et qui le saluent en passant.

À peine François de Torquat a-t-il quitté le parapet, entraînant ses Bretons, qu’une première balle lui brise le poignet. La blessure suffirait pour l’immobiliser ; il ne l’admet pas. Vite, un pansement sommaire, et le voilà de nouveau à la tête de sa compagnie. Mais la canonnade fait rage ; les rangs s’éclaircissent ; à 10 heures du matin, il s’affaisse. Et, tandis que les mitrailleuses allemandes balayent la plaine, François de Torquat, une jambe broyée, les yeux tournés vers le Christ des tranchées, renouvelle son sacrifice pour la France et pour les siens.

L’ordre du jour, paru à l’Officiel du 9 juin suivant, résume en quelques mots cette vie :

De Torquat de la Coulerie (François-Marie-Joseph), capitaine au 48e d’infanterie : « Officier démissionnaire, établi à l’étranger, est accouru en France dès l’annonce des hostilités. Beau type d’officier, caractère chevaleres-