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tinuer à la vivre. Et, pour terminer ce tableau, où je cherchai, fidèle secrétaire de la France, à préparer les versets d’une Bible éternelle de notre nation, je veux raconter ce qui advint à la mort du plus étonnant des héros que j’ai nommés, à la mort du capitaine-prêtre Millon, qui tomba sous Verdun après avoir calqué ses derniers jours sur les derniers jours du Christ.

Le capitaine Millon s’était lié intimement, dans les tranchées, avec son chef de bataillon, le capitaine P…, libre penseur et franc-maçon, d’une nature généreuse. Quand Millon fut tué, le capitaine P… vint trouver le soldat catholique Joseph Ageorges et lui dit : « La mort de Millon me fait beaucoup de peine. Si j’étais tombé le premier, il aurait dit une messe pour moi. Je ne crois pas, mais sait-on jamais ! Si l’âme est immortelle, Millon sera content que je pense à lui. Voulez-vous que nous allions demander au curé un service à son intention ? » Nous y