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Ma chère J… Comment vous remercier de tout le bien que vous me faites : par vos lettres si pleines de chaudes paroles qui réconfortent, si douces comme celles d’une sœur aînée qui me manque, mais que je trouve en vous… Que puis-je faire pour vous prouver ma reconnaissance ? Bien me battre ! pour bien vous défendre, et défendre avec vous toutes les jeunes filles de France qui se dévouent en ce moment pour leurs frères du front ; bien me battre pour vous épargner l’odieux contact des barbares que nous contenons ici, un bataillon contre deux, depuis un mois et demi.

Le jour de l’assaut, ma chère J…, à l’instant suprême où sur le signe de mon capitaine, j’enlèverai ma section au cri de : « En avant ! à la baïonnette ! » à cet instant superbement tragique où l’on joue sa vie, je songerai à vous, soyez-en sûre : « En avant, les gars ! En avant à la baïonnette pour les Françaises nos sœurs ! »

L’enfant se porte sur le seuil de tous les paradis qu’il n’a pas encore connus et veut les protéger, sans une seule pensée personnelle. Combien s’embrume l’éclatante chanson du jeune Sophocle, à Salamine, auprès de cette flamme qu’aucun aliment grossier n’alimente ! Et tous pareils ! Au