Page:Barrès - Les Diverses Familles spirituelles de la France, 1917.djvu/251

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et pourtant écoutez le cri que jette, de ces lieux de douleur et de mort, le jeune garçon au jour de Pâques 1915 :

Joyeuses Pâques ! Joyeuses Pâques ! Excuse la brièveté de ma lettre, je ne suis plus au repos, je suis en première ligne dans une cagna obscure où il pleut et où je ne peux me tenir qu’à genoux. Je commande en ce moment deux sections : aussi ai-je beaucoup à faire. Il me reste cependant assez de temps pour te dire que je vais très bien, que je t’aime, et que je suis très heureux. Joyeuses Pâques !

Quelle intensité de vie intérieure suppose un tel billet, et encore cette exclamation que je détache d’une autre lettre :

Terre d’Alsace que j’adore à l’égal de notre Dauphiné !

Elle est admirable, la spiritualité d’un tel vivat chez un enfant de vingt ans qui, nuit et jour, souffre dans la boue, à son humble rang ! Où puise-t-il ce génie de générosité ? Écoutez la missive d’un jeune chevalier français, au cœur pur :