Page:Barrès - Les Diverses Familles spirituelles de la France, 1917.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

allocution ranime les vieux souvenirs. Qui n’a pas, au lointain de son âme, un porche d’église illuminée au fond d’un village sur lequel tombe la neige ? Il s’y joint la douce voix d’une mère et notre main dans sa main. Beaucoup en célébrant la naissance de l’Enfant Dieu songeaient à leur dernier-né. Les soupirs, les pleurs, le courage des femmes françaises (de tous âges) étaient présents dans cette grange glaciale. Pour quelques-uns, c’était la plus tragique veillée des armes.

L. L…, aumônier de division coloniale, raconte comment il officia au fond d’une étable, à côté de deux vaches somnolentes : « Les assistants devaient se battre au sortir de la messe, dans des conditions telles que la plupart y resteraient. J’étais très ému en leur commentant, au son du canon, le mot Emmanuel, Dieu est avec nous. Presque tous communièrent, officiers, soldats pêle-mêle, le général Reymond à leur tête, à qui je devais fermer les yeux le lendemain