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« C’est en pensant à votre joie et en remerciant Dieu de ce grand bonheur qu’il nous accorde que j’ai reçu ce matin l’accolade de l’épée. Je porte à présent sur la poitrine le ruban rouge. J’ai, je crois, plus profité des circonstances que de mon mérite. Si la bonne Providence, si clémente pour moi depuis le début de la campagne, m’a ménagé cette occasion extraordinaire d’être spécialement remarqué parmi tant de braves, je ne doute pas que je le doive à vous tout d’abord. Le Ciel a voulu sans doute vous donner, à vous et à maman, ce bonheur au milieu de tant de sacrifices. J’en suis le bénéficiaire. Je m’en voudrais de m’en faire orgueil et je me contente de porter cette croix la tête haute, sachant qu’elle n’est pas un fruit d’injustice. Elle va me permettre de me présenter avec plus d’assurance devant la vie, si Dieu me la laisse… Je vous embrasse, mon cher papa, très ému à la pensée de votre fierté paternelle et bien reconnaissant de l’honneur que me vaut, sans doute, votre vie entière… »