— Ah ! François ! si tu l’avais vu !…
— Je l’aurais honoré ; mais plus loin, par delà ce maître, j’aspire à ne rien renoncer, à tout absorber pour faire avec tout de l’idéal ?
— Comment, de l’idéal ?
— Mais oui, pour en faire une matière qui intéresse mon âme. Ce que vous appelez une succession de faits vulgaires, un sentiment pour une femme, une intrigue politique, les acclamations populaires, je saurais les ressentir et les interpréter d’une certaine façon indéfinissable, poétique, avec amour. Et ces réalités ainsi ennoblies auraient des prolongements qui se confondraient en moi pour que je fasse d’elles toutes de l’unité, pour que je m’en augmente… Oui, c’est bien cela que je veux dire : absorber tout et en faire de l’idéal.
Ils étaient arrivés à Montmartre. Déjà l’heure du dîner avait passé, sans que de tels fiévreux s’en aperçussent. Ils regardèrent la ville dans ses ténèbres. De toutes les sortes de ténèbres Sturel et Rœmerspacher savaient faire sortir les beautés qui s’y cachent. Comme les magiciens qui retrouvent sous le sol des trésors invisibles, ils évoquaient, à se promener dans Paris, trop piétiné pourtant, bâti, bouleversé, des fantômes, dont ils faisaient leur compagnie. Ils avaient souvent animé le sanglier des Tuileries où s’accoudèrent Fontanes et Chateaubriand ; avec moins d’effort on fait parler Montmartre. Renaudin, habitué des réunions publiques, leur avait décrit l’esprit de cette butte qui, depuis des années, met son honneur à adopter les plus truculentes nouveautés de la politique. Montmartre se montrait à leur imagination gorgé d’éloquences, de