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UN HOMME LIBRE

grisé. Ne veux-tu pas m’enseigner à prier méthodiquement ?

Simon m’a dit dans la suite que j’avais excellemment parlé. Mon émotion l’enleva. Nous connûmes, ce soir-là, une ardente bonté envers mille indices de beauté qui soupirent en nous et que la grossièreté de la vie ne laisse pas aboutir. J’aspirais à souffrir et à frapper mon corps, parce que son épaisse indolence opprime mes jolies délicatesses. Comme je me connais impressionnable, je m’en abstins, et pourtant je n’eusse ressenti aucune douleur, mais seulement l’âpre plaisir de la vengeance… Tout cela j’hésite à le transcrire ; ce ne sont pas des raisonnements qu’il faudrait vous donner, mais l’émotion montante de cette scène à laquelle je ne sais pas laisser son vague mystérieux. Qu’ils s’essayent à repasser par les phases que j’ai dites, ceux qui soupçonnent la sincérité de ma description ! Si mes habitudes d’homme réfléchi n’avaient retenu mon bras, j’eusse été aisément sublime, et frappant mon corps, j’aurais dit : « Souffre, misérable ! gémis, car tu es