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UN HOMME LIBRE

par brins, mon chagrin, pour le dessécher, puis le réduire en poussière qu’on jette au vent. Voyez quel recul j’avais fait dans la voie des parfaits, puisque Simon, qui fut ma première étape, me redevenait nécessaire.

Vous connaissez ces insomnies que nous fait une idée fixe, debout sur notre cerveau comme le génie de la Bastille, tandis que, nous enfonçant dans notre oreiller, nous nous supplions de ne penser à rien et nous recroquevillons dans un travail machinal, tel que de suivre le balancier de la pendule, de compter jusqu’à cent et autres bêtises insuffisantes. Soudain, à travers le voile de banalités qu’on lui oppose, l’idée réapparaît, confuse, puis parfaitement nette. Et vaincu, nous essayons encore de lui échapper, en nous retournant dans nos draps. Enfin, je me levais, et par quelque lecture émouvante je cherchais a m’oublier. Tout me disait mon chagrin, au point que les romans de mes contemporains me parurent admirables.

Ce n’étaient pas ses yeux, ni son sourire qui m’apparaissaient dans mes troubles ; je ne