Page:Barrès - Le culte du moi : un homme libre.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
167
UN HOMME LIBRE

mon pauvre enfant, ne me tentez pas avec votre juste accablement, car je veux loyalement faire cette tentative. »

Devant un portrait de jeune fille qui fut longtemps, mais à tort, attribué au Vinci, jeune fille gracieuse sans plus, avec une âme un peu ironique et de petite race, je trouvai un jeune homme qui pleurait.

— L’histoire de cette jeune fille est-elle touchante ? lui dis-je : ni Gautier, ni Taine, ni Ruskin n’en parlent. (Je citais ces noms pour gagner sa confiance, car je pensais voilà quelque poète.)

— Je l’ignore, me répondit-il.

— Il y a parfois des ressemblances émouvantes. (Sa vive émotion, ses pleurs me permettaient ces familiarités.)

— Je ne pense pas qu’on puisse comparer aucune fille à celle-ci.

— Eh bien ! repris-je.

— Ah ! me dit-il simplement, le grand homme a mis sa main là.

Je le tiens admirable pour sa foi, ce croyant. Notez que le concierge lui-même sait que le tableau n’est pas de Léonard. Puis la