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UN HOMME LIBRE

des larmes que l’esprit répand transfigure l’univers qu’il contemple.

Les chanteurs, la musique disaient :

Ah ! laisse-moi puiser la fièvre

Marie s’égara dans sa tentative pour systématiser sa vie. Un prix au Salon annuel n’est pas, comme elle le croyait, un but suffisant à tous ces désirs vers tous les possibles qui sommeillent au fond de nous. Du moins, elle désira l’enthousiasme. Et même cette fièvre put grandir en elle avec plus de violence que chez personne, car elle était un objet délicat, nullement embarrassée de ces grossiers instincts qui ralentissent la plupart des hommes. À son contact, j’affinerai mes frissons, et mon sang brûlera d’une ardeur plus vive auprès d’un tel corps qui me semble une flamme. Ah ! laisse-moi puiser la fièvre à m’imaginer cette jeune poitrine qui ne fut gonflée que pour des choses abstraites. Les chanteurs, la musique disaient :

Dors, noble enfant, repose à jamais

Quoi qu’on me dise un jour., quelque dé-