Page:Barrès - Le culte du moi : un homme libre.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
153
UN HOMME LIBRE

Je me levai perdu de froid, très tard, dans une matinée de dégel. Rose, qui est trop honnête fille pour que j’en fasse des anecdotes, entrait dans ma chambre avec bonhomie, car c’était son jour. Si elle avait profité des enseignements du catéchisme, elle se fut plu (elle un peu gouailleuse) à me comparer au vieux roi David qui réchauffait sa vigueur près de jeunes Juives. Ensuite, je la priai qu’elle baissât les stores à fleurs éclatantes pour me cacher l’ignominie du monde, qu’elle activât le feu comme un four de verrier, et qu’elle se retirât. Je me recouchai tout le jour, soucieux uniquement d’interroger ma conscience.

Et dans notre conférence du soir, sans plus tarder, je dis à Simon :

— Singulière physionomie de mon âme ! La disgrâce universelle me mécontente, au point que vous-même me blessez, mon cher ami, mon frère, quand vous partagez mes façons de voir. Il ne me suffit plus qu’on