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UN HOMME LIBRE

TROISIÈME JOURNÉE
la lorraine se développe

Cette Ville-Vieille, ce musée lorrain, tout incomplets, éveillent à chaque pas des traits délicats de ma sensibilité ; ils me ravissent par la clarté qu’ils apportent dans mes émotions familières, ils m’attristent parce qu’ils me font toucher l’irrémédiable insuffisance de l’âme que me fit cette race.

Deux grandes causes d’échec pour la Lorraine : le pays fut si tourmenté que les artistes, c’est-à-dire une des parties les plus conscientes de la race, désertaient continuellement, s’établissaient en Italie, s’y déformaient ; bons ou mauvais, ils devenaient Italiens en Lorraine. Puis il n’y eut pas de riche bourgeoisie pour s’enorgueillir d’un art local, mais une aristocratie, sans cesse en rapport avec des pays plus puissants, honteuse de sentir son provin-