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phète Isaïe, sans parler d’Ézéchiel et de Jérémie. Il ne s’arrêtait que vaincu par ses battements de cœur.

Aucun des propos du pauvre garçon, nulle des démarches de Léopold n’échappait à la cure de Saxon. Le Père Aubry, sachant avec quelle force rejettent, sur un vieux sol religieux, les plus profonds instincts que semblaient avoir chassés les prières et l’eau bénite, aurait voulu vider l’abcès, y mettre le fer et le feu. C’était bien l’avis de l’Évêque. Nulle transaction avec le diable, pas d’armistice avec l’enfer ! Mais en sage prélat, Il ajoutait : « C’est avant tout sous le silence que vous devez les écraser. » Fidèle à cette consigne, l’Oblat ne bougeait pas, se bornait à se tenir sur le qui-vive et à se procurer, quasi chaque jour, une sorte de rapport militaire sur ce qui se passait dans la secte.

Un matin, le facteur, en montant le courrier au presbytère, avertit la servante que François Baillard venait de passer une nuit très mauvaise et qu’il était au plus mal. La bonne femme prévint aussitôt son maître, qui, laissant là son déjeuner, se hâta de descendre chez Marie-Anne.

Ce n’était pas la première fois que l’Oblat assistait à l’agonie d’un Enfant du Carmel.