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UN RAT EMPOISONNÉ

repaire qu’il avait convoqué et, avec cet accent de Montélimar qui éveille la défiance d’un Normand :

— Ah ! mon pauvre procureur général, cette affaire m’empêche de dormir !

M. Prinet veut bien ajourner le moment que tout à l’heure il disait « venu ». Il attendra au lendemain 5 novembre pour envoyer rue Murillo un commissaire de police chercher les pièces justificatives. Le sieur Reinach aura vingt-quatre heures pour les maquiller. Mais ce répit, c’est tout ce que peut consentir le magistrat, et le 5, en tête de la commission qu’il remet à M. Clément, il inscrit : « Urgent. »

Ce 5, les reporters antiparlementaires publient des articles de cannibales sur le trouble du baron de Reinach dans le couloir du juge d’instruction, et M. Loubet appelle une fois de plus à la place Beauvau M. Quesnay de Beaurepaire.

— Avec une presse pareille, lui dit-il, on ne peut pas gouverner dans un pays civilisé.

Le procureur général ne se connaît pas le devoir de « gouverner », mais d’exécuter des ordres. Il se permettra seulement de soumettre à M. Loubet un avis :

— Vous en revenez toujours aux conséquences politiques : eh ! monsieur le président du conseil, vous n’avez pas à prendre un parti contre les députés corrompus avant une dénonciation régulière ! Attendez qu’on livre les noms !