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LEURS FIGURES

les abjects commencements d’un Cornelius Herz ou d’un baron de Reinach, on mesure leur prodigieuse fortune et la moralité du régime, point méchant, mais de basse corruption, où fut possible le triomphe de ces laquais allemands.) Aux Quatre-Mares, Cornelius Herz, audacieux, vigoureux, besogneux, plaisait par les ressources de sa bouffonnerie. Il escroqua M. Laiber, pharmacien en chef de l’asile, et l’économe, M. Dufour. Il réjouissait de son amour la blanchisseuse de l’établissement ; elle lui prouvait sa reconnaissance en marquant C. H. les chemises du docteur Bergognier, maire de Rambouillet. Le scandale prenant des proportions exagérées, le docteur Dumesnil le mit à la porte. Il navigua sur Chicago, fit l’emplette d’un diplôme de médecin, épousa une jeune fille de Boston, puis partit pour San-Francisco où il s’associa avec le docteur Stout. « Cornelius Herz », — a dit le docteur Stout en prenant possession de sa chaire à l’hôpital de Saint-Luc, — « c’est le plus grand filou qui ait jamais existé. Il m’a entraîné dans une faillite. Il m’a soustrait plus de vingt mille livres. » Cornelius se présenta alors à la loge Mount-Mariah. Abusant de la naïveté de deux frères, il leur extorqua plus d’un million. Avec ce million il fonda un cabinet pour le traitement des maux de tête. Procédé, raconte-t-on, d’une simplicité comique. Le client s’assied ; Cornelius l’électrise jusqu’à l’abrutissement, puis