contrastait aimablement avec les orgueilleuses idées qui commençaient de croître en lui et qui peut-être n’avaient pas été étrangères à sa fièvre ! Cependant il ne mangeait pas, se voyait pâle dans les yeux de sa mère inquiète et respirait avec une intensité prodigieuse l’air, le soleil, les forces éparses de Lorraine… Pourquoi donc, après quatorze ans, évoque-t-il ces enfantillages ? C’est qu’ils demeurent à la racine de toutes ses pensées ; c’est qu’aujourd’hui, dans ce soir d’été, convaincu de ses échecs de politique et d’amour, se sentant de toutes parts « en l’air », auprès de sa mère encore il se retrouve tout naturellement et, derrière elle, en fond de tableau, il voit les horizons de son pays, des lignes simples, où rien ne l’étonnerait ni le dominerait. Prompt à se décourager, à détester les lieux de sa défaite, il entrevoit sur un terrain moins vaste et dans une discipline toute prête la possibilité d’agir avec effet. Au cours de cette soirée, il lui demanda :
— Pourquoi ne retournerions-nous pas en Lorraine ?
— Qu’y faire ? dit Mme Sturel. Nous n’y connaissons plus personne, et personne, François, ne t’y reconnaîtrait.
Ils se virent comme deux exilés.
À cet instant des cris éclatèrent dans la rue des Mathurins, si terribles, qu’après une seconde une masse d’individus, tous les passants, couraient sur