Page:Barrès – Leurs Figures.djvu/264

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
260
LEURS FIGURES

Spuller et des Freycinet. Au reste, rien dans la nature n’est aussi simple que nos classifications. Et, dans cette minute même, un Cornelius, tout en maniant ses bons papiers de chantage, se grisait comme un idéaliste des grands mots de Justice, de Liberté :

— J’espère, disait-il, que l’Angleterre aura assez de clairvoyance pour comprendre que, sous une fausse qualification, on poursuit contre moi la satisfaction de haines politiques. Les avertissements ne m’ont pas manqué ; je pouvais partir pour les États-Unis qui ne livrent leurs nationaux pour aucun délit ; je suis resté en Angleterre. Il est vrai que mon triste état de santé ne me permettait pas plus de m’embarquer pour l’Amérique que pour la France. J’attends les décisions du gouvernement anglais. Je ne crois pas que l’extradition puisse être accordée ; mais, dans l’état d’affaiblissement moral et physique où je suis tombé, je ne supporterais même pas l’arrestation préventive.

En disant ces mots, il dirigeait sa main vers un revolver caché dans sa gaine, sur la table de nuit. Mme Herz commença de pleurer et cria :

— Songe à tes enfants !

— Pourvu qu’on me prolonge ! dit Herz. Je suis sûr que je serai mis hors de cause.

Il aimait tant cette belle nation française ! Au milieu de ses souffrances, il poursuivit une décou-