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VAINES DÉMARCHES DE STUREL

faudrait dire », jetait M. Waldeck-Rousseau aux jeunes avocats assis derrière lui.

Immoralité d’un procès où les juges, les accusés et toutes les puissances se coalisaient pour résister à la vindicte publique ! Le meilleur argument pour désarmer celle-ci, c’était que les administrateurs avaient dû subir les exigences des financiers, des publicistes, des hommes du monde et des parlementaires pillards, de la même manière que le chef d’une caravane à travers le Sahara paie tribut aux pirates du désert. Il eût été agréable à la France que, tout d’un coup. M. Charles de Lesseps se levât et produisît la liste des chéquards. Mais un Lesseps sait que l’opinion publique, facile à émouvoir, est difficile à utiliser ; il préférerait traiter avec le pouvoir ; il cherche à échanger ses prisonniers plutôt qu’à les exécuter. Pourtant il donnera un échantillon de ses ressources ; au milieu de la plus cruelle allégresse d’un public qui tient le Palais-Bourbon pour un repaire de bandits, il donne le coup de grâce à Baïhaut déjà terrassé.

— En 1886, nous étions en instance auprès du gouvernement, au sujet de notre émission d’obligations à lots. M. le ministre Baïhaut nous fit demander par un intermédiaire de mettre un million à sa disposition. Un premier acompte de 375,000 francs fut remis à cet intermédiaire. Nous avions le couteau sur la gorge…