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UN ROI QUI SE FORME

déférent que ce sont là d’honorables sentimentalités, étrangères toutefois à la politique, Sturel consentit à reprendre terre :

— Tu te plaignais, il y a un an, du vieux monde opportuno-radical qui te barre le chemin du pouvoir.

— C’est exact, mais aujourd’hui si je les attaquais, bien plus, si, attaqués, je ne les soutenais pas, je ne serais même pas réélu.

— Eh bien ! dit Sturel, c’est moi qui dénoncerai la corruption. La presse vaut bien la tribune… Prenons rendez-vous pour relire notre « note ».

— Sturel, je regrette que tu me confies tes intentions. Il y a des projets qu’on laisse ses amis ignorer, car les en instruire, c’est les obliger à une complicité qui contrarie peut-être leur ligne de conduite. Rappelle-toi donc que tu ne m’as rien dit, et quant à la « note » j’ai ta parole qu’en tout état de cause j’y suis étranger.

— Capon ! murmura Sturel, qui retrouva spontanément pour son ancien camarade leur argot de lycée.

Il pensait naïvement, à la française, que c’est toujours un tort d’avoir peur.

Cinq cent quatre-vingts personnes venues de tous les points du pays composent la Chambre des députés. Stendhal se vantait d’avoir pu observer, durant la retraite de Russie et dans la