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LEURS FIGURES

nach, que nous préparions l’an dernier pour le Général, c’est toi, maintenant, qui devrais la porter à la tribune.

— Non seulement je ne la publierai pas, mais je trouverais absurde qu’on la publiât.

— Tu m’y poussais autrefois…

— Nous avions Boulanger pour utiliser un scandale, mais aujourd’hui quel bénéfice à détruire les parlementaires ?

— Mon bénéfice, dit Sturel, en s’échauffant sur ce vilain mot, c’est de venger Boulanger.

Il s’entêtait à nourrir des rancunes et des chimères politiques qui le faisaient peu sociable et pareil à un exilé.

Comme Suret-Lefort marquait par un silence

    « Des chèques furent remis par le baron de Reinach. Nul doute que celui-ci n’en possède les talons et que, par ailleurs, le banquier payeur n’ait gardé pour sa décharge le papier présenté.
    « Il y eut des sommes versées directement par les administrateurs et le plus souvent, semble-t-il, de la main à la main, sans chèques ni reçus.
    « Le nommé Arton, délégué par la Compagnie et plus spécialement par le baron de Reinach, se vante d’avoir dispersé un million trois cent quarante mille francs entre cent quatre députés. Il cite les noms et les chiffres, qui variaient suivant la résistance et l’importance du personnage. Il est monté jusqu’à deux cent cinquante mille francs en faveur de Floquet, pour les besoins du gouvernement ; il descendait parfois à mille francs.
    « Enfin, la Compagnie consentait à certains journaux, dirigés par les parlementaires, des prix de publicité en disproportion avec leur tirage. Parfois même elle fournit le journal à tel politicien qu’elle prenait ainsi à sa charge. »