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LEURS FIGURES

la mort naturelle des grands personnages. Les uns dirent : « Le baron est en fuite ; dans son cercueil on ne trouvera que des cailloux. » D’autres crurent à un assassinat. « Ne voyez-vous pas que pour se couvrir il allait dénoncer des hommes politiques ? Ils l’ont empoisonné. Ces mœurs vous surprennent ? Mais ce Reinach lui-même a tenté jadis d’empoisonner Cornelius Herz. Et ce Herz, pourquoi vient-il de filer en Angleterre ? » Ces rumeurs se mêlaient pour faire un grand cri de défiance contre les parlementaires : « Entre eux tous, il y a un cadavre ! »

Ce cadavre, on le cherchait, on le sentait, on le nommait. Comme au théâtre, quand l’entr’acte se prolonge, la France tapait des pieds, réclamait « le Baron ! le Baron ! » On exigeait que Reinach sortît de sa fosse et de ses cartonniers.

Vu les circonstances, et puisqu’il restait une fille mineure, on ne s’explique point que les scellés n’aient pas été posés d’office aux divers domiciles du défunt. C’est le 20 novembre au matin que Joseph brûlait des papiers près du cadavre (où l’on trouva vide la chemise des lettres d’Arton), et c’est le 23 seulement qu’à la requête de M. Imbert, nommé administrateur de la succession, les scellés furent posés au 20 de la rue Murillo, à la banque Propper (ancienne maison Kohn-Reinach), au siège social de la Compagnie des Chemins de fer du sud, et enfin au château de