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LEURS FIGURES

«pourrais l’affirmer, mais je ne crois pas que nous ayons dit quoi que ce fût. »

Ainsi voilà l’attitude de M. Clemenceau : le silence. Quant à ses pensées, un profond attendrissement sur ce pauvre baron qui se meurt de ne pouvoir attendrir Ducret.

Sur cette entrevue avec Constans qui, vers sept heures un quart du soir, ne fut ni moins dramatique, ni moins mystérieuse que la précédente, MM. Clemenceau et Constans nous fournissent seuls des détails. Ils les apportèrent le mercredi 14 décembre, soit vingt-cinq jours après ces événements, à la Commission d’enquête. On remarque que M. Constans demanda d’être dispensé du serment. « Je donne ma parole d’honneur que je dirai ce que j’ai à dire, ce que je sais, de la façon la plus loyale et la plus nette, mais je tiens à ne pas aller au delà. » Quel sens donner à cette phrase ambiguë[1] ?

Voici la version de ces messieurs : Constans s’était mis à dîner vers sept heures. On lui passa une carte de Jacques de Reinach qui sollicitait instamment de lui parler. Il se leva de table et rencontra dans son antichambre Reinach et Clemenceau. Il les introduisit dans son cabinet et leur exprima sa surprise de les

  1. Examinez en regard la formule complète du serment dont M. Constans pria qu’on le dispensât : « Vous jurez de parler sans haine et sans crainte, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ? — Je le jure. »