— Je suis pour le Général Boulanger et je ne crains pas de le dire. Ce sont les Allemands qui veulent le faire partir de Paris ; eh bien ! il ne partira pas, c’est moi qui vous en donne ma parole. Aujourd’hui, rapport à mon service, je ne vais pas à la gare de Lyon. Mais dimanche, à la revue, personne ne m’empêchera de crier : « A bas Ferron-la-Honte ! »
— Très bien, — dit Renaudin, et il se présenta : — Renaudin… du XIXe Siècle… Ami personnel et défenseur du Général Boulanger.
— Ah ! vous êtes M. Renaudin, Alfred Renaudin, celui qui…
Ils se serrèrent la main, et le brave garçon la tendit aussi à Sturel. Saint-Phlin lui glissa cent sous de pourboire. Plusieurs consommateurs se mêlèrent à la conversation : tous soutenaient le Général. Suret-Lefort, debout sur le trottoir, fit un petit discours très sec et très optimiste :
— Le cabinet imposé par l’Allemagne ne peut pas durer contre l’opinion publique. S’il tombe, c’est le Général Boulanger, nécessaire à la sécurité nationale, qui revient au pouvoir.
Une vingtaine de personnes les suivirent. L’important Renaudin exprima son ennui de ne pas voir de police :
— J’aime les manifestations où les flics assurent l’ordre et barrent les passages. Je les flétris dans mon compte rendu, mais, sans eux, à quoi bon un coupe-file ?
Exactement à sept heures et demie, un immense cri de : « Vive Boulanger ! » féroce, violent, retentit, tandis que toutes les mains agitaient des chapeaux.