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CHAPITRE II

LES ÉLÉMENTS QUI FERMENTAIENT
AUTOUR DE LA GARE DE LYON

Après l’affaire Schnæbelé, Rœmerspacher et Sturel, qui ne retournaient pas à l’étranger, désirèrent se revoir. Ils n’eurent pas l’idée de se donner rendez-vous à Nancy, à Neufchâteau ou à Nomeny, Paris était le lieu où ils trouvaient des souvenirs et des conditions agréables de vie : leur vrai chez soi. À la fin de mai, ils descendirent au Quartier latin. De très petites choses, qu’ils avaient faites machinalement pendant des années, leur devenaient par cela seul agréables. Et quand, au café Voltaire, le vieux garçon qui leur avait versé leur premier café, en 1882, à vingt et un an, à l’âge où ils débarquaient de province, les reconnut, ils eurent une manière d’émotion.

Physiquement et d’esprit, Sturel n’avait guère changé, toujours droit, mince, avec de beaux yeux et des traits accentués. Rœmerspacher ne gardait aucun air d’adolescence ; un peu lourd de corps, avec une figure d’une magnifique humanité, quoique la