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BOULANGER S’ESSUIE LE VISAGE DEVANT STUREL

dant, se disait-il, à supposer que je représente un arrondissement de ma région, je ne trouverai pas dans la législation existante des moyens pour restituer une voix efficace à la terre et aux morts ? C’est Paris qui décidera l’issue de cette bataille engagée pour donner à la France une orientation nouvelle. Libérer des parlementaires la capitale, ce serait ressusciter les provinces. »

Il soumit la difficulté à Saint-Phlin, qui violemment le détourna de toute candidature, sinon en Meurthe-et-Moselle, dans la Meuse ou dans les Vosges. Et peu importait que le terrain parût plus ou moins favorable ! Sturel devait aborder la tâche en l’acceptant avec toutes ses inconnues. Saint-Phlin lui donnait en exemple Suret-Lefort, qu’il se flattait de dresser au nationalisme lorrain et à qui il procurerait l’appui des conservateurs.

Comme Sturel balançait encore, il apprit qu’on inscrivait Mouchefrin sur les listes boulangistes et que ce malheureux déjà faisait tapage des cinq mille francs qu’il « palperait ». Il eut tôt fait par une lettre à Londres de clore ce scandale. Manquait-on à ce point d’honnêtes gens ? Rœmerspacher, qu’il alla presser d’accepter une candidature, le reçut comme s’il apportait des propositions dégradantes ; et quelques jours après, à Mme de Nelles disant combien cet accueil avait peiné leur ami, il répondait :

— Je comprends un gros propriétaire, comme M. de Nelles, un avocat intrigant, comme Suret-Lefort, qui se donnent à la politique active. Pour François, nerveux, délicat, Imaginatif, c’est une aventure. Il se livre à tous les hasards, à tous les ennuis. Eh bien ! moi, je défends contre la vie ma