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BOUTEILLER ET LE PARLEMENT

pliquer la loi, les justes lois, comme dit Joseph, le jeune et brillant neveu de notre excellent baron de Reinach. Sans doute les boulangistes habitués à une tolérance excessive protesteront, et leurs diatribes pourront passagèrement émouvoir, mais que les fonctionnaires se sentent couverts dans leurs services et impitoyablement exécutés dans leurs trahisons ; que le gouvernement ouvre ses dossiers de police, qu’il emploie son influence spéciale pour trouver de l’argent à la presse et aux députés ; que l’on retourne enfin contre Boulanger son insolent « A bas les voleurs ! » Ne disposons-nous pas régulièrement du Sénat constitué en Haute-Cour ?

Au service du Panama, Bouteiller avait étudié la topographe parlementaire. Il ne communiqua ces dernières pensées qu’à ceux-là dont il avait apprécié la sûreté en négociant la loi des valeurs à lots. Il s’accorda avec Bouvier, qui n’avait rien à espérer d’une modification du régime, puisqu’il y satisfaisait son activité et ses intérêts, avec Emmanuel Arène, Baïhaut, Jules Roche, avec Hébrard, Magnier, Raoul Canivet, Charles Laurent, Camille Dreyfus, Eugène Mayer, avec tous les vétérans, qui, promus par la mort de Gambetta à une sorte de capitainerie, n’entendaient pas accepter un nouveau chef et surtout une équipe concurrente.

Sans prestige public, de tels hommes excellent dans les manœuvres du Palais-Bourbon et du Luxembourg ; ils commencèrent une campagne habile contre le ministère. Les chefs radicaux pouvaient-ils résister à cette intrigue opportuniste ? L’appui populaire leur manquait depuis qu’ils avaient renié sans motif suf-