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L’APPEL AU SOLDAT

avait peur ; il ne souhaitait que la présidence de la Chambre. Et puis l’orgueilleux, jaloux de son ancien camarade de collège, n’acceptait pas d’être au ministère le protégé de cette grande popularité.

À cet instant, on appela dehors le Général. M. Le Hérissé, député radical de Rennes, l’attendait sur le palier et lui dit à l’oreille que M. de Martimprey le priait d’entendre une communication importante. Ils descendirent. À la porte, Renaudin veillait dans une voiture.

— A-t-on décidé quelque chose là-haut ? dit-il en se précipitant.

Le Général répondit :

— Ils ne savent même pas ce qu’ils veulent ; il n’y a plus qu’à dormir.

Le reporter, jaloux de Le Hérissé, les suivit jusqu’à la rue de Monceau. Il attendit quelque temps aux abords de la maison où ils entrèrent, puis, craignant d’être surpris et d’encourir la colère du Général, il alla dans un restaurant de nuit consulter un livre d’adresses. Il pressentit que le Général était chez M. de Martimprey. Il se tut et n’en aima que mieux un chef qui s’engageait à fond.

M. de Martimprey, ancien officier breveté d’artillerie, avait servi sous Boulanger. Il lui exposa qu’afin d’empêcher l’élection de Jules Ferry, la droite voterait au Congrès pour le candidat quel qu’il fût qui s’engagerait à rappeler au pouvoir le ministre cher à tous les patriotes. Le silence, l’acquiescement peut-être du Général émurent ce tentateur. Il sortit d’une chambre voisine M. de Mackau, qui tenait à la main des pleins pouvoirs du comte de Paris et qui parla de la gloire enviable de Monck. Le Général, redevenu