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LA SÉPARATION DES POUVOIRS.

C’est une règle fondamentale de toute libre constitution que les pouvoirs n’y soient pas concentrés dans un seul corps, parce que cette concentration serait le despotisme. La vérité de cette règle se montre surtout au sujet du pouvoir judiciaire, C’est là que la nécessité de la séparation éclate avec le plus d’évidence. Supposez que ce pouvoir soit réuni, soit à la puissance législative, soit à la puissance exécutive, soit aux deux ensemble, réunies elles-mêmes dans les mêmes mains, la fortune, l’honneur, le sort des citoyens, n’ont plus de garantie. La loi n’est plus, en effet, une garantie pour eux, quand ceux qui sont appelés à juger leurs différends ou les infractions dont ils sont accusés, sont ceux-là mêmes qui ont le pouvoir de la faire ; et la puissance exécutive devient un glaive à deux tranchants, quand elle a le pouvoir de juger en même temps que celui d’exécuter. Il est donc nécessaire que le pouvoir judiciaire soit séparé des deux autres, et que son action, uniquement soumise aux lois, qu’il a la mission d’interpréter, s’exerce avec une entière indépendance.

Pour ce qui est du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, la séparation n’est pas d’une aussi impérieuse nécessité, et elle ne peut pas être aussi absolue. On conçoit à la rigueur une assemblée réunissant ces deux pouvoirs sans menacer pour cela la liberté des citoyens, et il faut bien qu’ils se pénétrent dans une certaine mesure pour accomplir leur œuvre commune