Page:Barni - Les Martyrs de la libre-pensée.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
12
première leçon

auxquelles il se livrait parfois, comme au siège de Potidée, où il resta vingt-quatre heures debout et immobile, ont cherché à démontrer qu’il était sujet à de véritables hallucinations et qu’il fallait le mettre au rang des fous. Quelque singuliers que semblent les faits que l’on allègue, les hallucinations de Socrate ne me paraissent nullement prouvées. Tout ce qu’il y a de certain, c’est qu’en personnifiant, comme il le faisait, ses sentiments ou même ses pressentiments, il tombait dans une illusion résultant à la fois de leur vivacité et de sa croyance à l’intervention de certaines puissances intermédiaires entre Dieu et l’homme. Mais cette illusion allait-elle, comme on l’a prétendu, jusqu’à l’hallucination ? C’est ce qui reste au moins douteux. Que si le fait de l’hallucination était prouvé, et s’il fallait accepter la conclusion qu’on en tire, je dirais alors qu’il y a de sublimes folies, qu’il y a des folies qui valent mieux que la sagesse des gens raisonnables, et qu’il serait à souhaiter, pour l’honneur et le bonheur du monde, qu’il y eût beaucoup de pareils fous. Que l’on songe en effet (et ici je reviens au point que je voulais surtout faire ressortir), que l’on songe au caractère essentiellement moral et aux merveilleux effets de cette folie ! À part quelques faits excentriques, qui ne sont peut-être pas eux-mêmes bien certains, le démon de Socrate ne représente-t-il pas l’instinct moral le plus pur et le plus sublime ? Et si par ce que l’un de vos