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sse et de ton pardon ! Ne parle pas du mien, ne dis jamais que tu as eu des torts envers moi. Qu’en sais-je ? Je ne me souviens plus de rien, sinon que nous avons été bien malheureux et que nous nous sommes quittés. Mais je sais, je sens, que nous nous aimerons toute la vie…. Le sentiment qui nous unit est fermé à tant de choses, qu’il ne peut se comparer à aucun autre. Le monde n’y comprendra jamais rien. Tant mieux ! nous nous aimerons et nous nous moquerons de lui. »

«…. Je vis à peu près seule…. P. vient dîner avec moi. Je passe avec lui les plus doux moments de ma journée à parler de toi. Il est si sensible et si bon, cet homme ! Il comprend si bien ma tristesse ! Il la respecte si religieusement ! »

Les lettres de George Sand étaient plus généreuses que prudentes. Elles agirent fortement sur une sensibilité que la maladie avait surexcitée. Musset était arrivé à Paris le 12 avril et s’était aussitôt lancé à corps perdu dans le monde et les plaisirs, espérant que la distraction viendrait à bout du chagrin qui le dévorait. Le 19, il prie son amie de ne plus lui écrire sur ce ton, et de lui parler plutôt de son bonheur présent ; c’est la seule pensé qui lui rende le courage. Le 30, il la remercie avec transport de lui continuer son affection, et la bénit pour son influence bienfaisante. Il vient de renoncer à la vie de plaisir, et c’est à son grand George qu’il doit d’en avoir eu la force. Elle l’a relevé ; elle l’a arraché à son mauvais passé ; elle a ranimé la foi dans ce cœur