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Nous savons également par son frère qu’il s’est peint lui-même dans le portrait de Valentin par où débutent les Deux Maîtresses. La page qu’on va lire est donc un souvenir personnel, et elle nous montré aussi un enfant trop impressionnable ; « Pour vous le faire mieux connaître, il faut vous dire un trait de son enfance. Valentin couchait, à dix ou douze ans, dans un petit cabinet vitré, derrière la chambre de sa mère. Dans ce cabinet d’assez triste apparence, et encombré d’armoires poudreuses, se trouvait, entre autres nippes, un vieux portrait avec un grand cadre doré. Quand, par une belle matinée, le soleil donnait sur ce portrait, l’enfant, à genoux sur son lit, s’en approchait avec délices. Tandis qu’on le croyait endormi, en attendant que l’heure du maître arrivât, il restait parfois des heures entières le front posé sur l’angle du cadre ; les rayons de lumière, frappant sur les dorures, l’entouraient d’une sorte d’auréole où nageait son regard ébloui. Dans cette posture ; il faisait mille rêves ; une extase bizarre s’emparait de lui. Plus la clarté devenait vive, plus son cœur s’épanouissait…. Ce fut là, m’a-t-il dit lui-même, qu’il prit un goût passionné pour l’or et le soleil. » Notons encore à treize ans, pendant une partie de chasse où il avait failli blesser son frère, une attaque de nerfs assez violente pour amener la fièvre, et nous aurons la clef de bien des incidents de son existence tourmentée.

Les années de collège furent aussi dénuées d’événements que celles de la première enfance. Musset