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il avait fallu à Clive une grande finesse pour déjouer les mauvaises intentions de ses ennemis ou de ses envieux, une grande ardeur pour stimuler la timidité de ses partisans, une décision ferme et prompte quand le moment d’agir était arrivé. Mais une grande pensée l’avait animé, celle d’asseoir la puissance anglaise dans l’Inde sur une large et solide base. Le succès dépassa toute espérance. L’intronisation de Meer-Jaffier par les armes anglaises est le véritable commencement, la fondation même de l’empire anglais dans l’Inde ; c’était la réalisation, au Bengale, du vaste plan formé par Dupleix sur le Deccan. Le mot échappé à Clive dans sa jeunesse venait de se vérifier : Dieu avait voulu de lui quelque chose.

Après la conclusion du traité provisoire de 1754, les deux négociateurs Saunders et Godeheu étaient partis pour l’Europe. Tous deux, le dernier surtout, ne mettaient point en doute d’avoir fondé la paix de l’Inde sur des bases inébranlables ; leurs prévisions étaient pourtant démenties avant leur arrivée au terme du voyage. Madura est un petit royaume au midi de Tritchinopoly ; Tinivelly, un autre petit royaume au midi de Madura, s’étendant de la frontière de ce dernier au cap Comorin ; reconnaissant l’un et l’autre la souveraineté du subahdar du Deccan, et payant un tribut au nabob d’Arcot. Chunda-Saheb, alors maître de Tritchinopoly, avait institué gouverneur de Madura son propre frère, bientôt lui-même remplacé par un soldat de