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Les rameurs du bateau, fatigués du travail de la journée, s’arrêtèrent à Rayah-Mahal ; le nabob et la compagne se cachèrent dans un jardin abandonné. Au point du jour, il fut reconnu par un homme du peuple, auquel il avait fait couper peu de mois auparavant le nez et les oreilles. Excité par le désir de la vengeance, cet homme courut le dénoncer à une troupe de soldats précisément en quête des fugitifs, et qui le traînèrent à Muxadavad, après lui avoir fait éprouver, chemin faisant, les traitements les plus barbares et les plus humiliants. Arrivé à minuit à Muxadavad, il n’en fut pas moins conduit et immédiatement chargé de liens en présence de Meer-Jaffier, maître alors de ce même palais où lui-même avait vécu, peu de jours auparavant, entouré de toute la splendeur d’un monarque asiatique. Jaffier devait sa fortune à Aliverdi-Khan. On dit qu’il parut ému et versa quelques larmes à l’aspect du petit-fils et de l’héritier de son bienfaiteur, qui à genoux et tout tremblant demandait la vie au milieu de sanglots entrecoupés. Mais Meirum, fils de Jaffier, adolescent de dix-sept ans, d’une férocité précoce, loin de partager l’émotion de son père, insistait pour qu’il fût mis à mort sur-le-champ. Jaffier donna l’ordre d’éloigner le prisonnier, et comme une partie des grands et des principaux officiers de l’État se trouvaient en ce moment réunis par hasard au palais, il les consulta sur le parti à prendre. Les uns, soit qu’ils craignissent d’encourager dans le nouveau nabob de san-