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cesse d’être jugé par un conseil de guerre. Le parlement retint la cause ; les conseillers de la grand’chambre voulurent demeurer juges souverains des opérations militaires les plus compliquées. Au commencement des interrogatoires, Lally, apercevant la sellette, découvrit à la fois sa tête blanchie et sa poitrine, couverte de nombreuses cicatrices, et s’écria : « Voilà donc la récompense de cinquante-cinq ans de services ! » Le 6 mai 1766, l’arrêt fut prononcé. Cet arrêt déchargeait Lally du crime de haute trahison et de concussion, mais le condamnait à être décapité comme convaincu d’avoir trahi les intérêts du roi et de la Compagnie des Indes, d’abus d’autorité, vexations, exactions, etc. On le fit alors sortir de la Bastille, prison d’État, pour le mettre à la Conciergerie, réservée aux criminels ordinaires. Lally, bien qu’il connût les conclusions de l’arrêt, espérait encore ; une demande en grâce avait été adressée au roi par de nombreux amis. Mais cette espérance était vaine ; le vendredi 9 il fut amené à la chapelle de la Conciergerie, où, se trouvaient le greffier du parlement et un confesseur. Le greffier commençait la lecture de l’arrêt d’une voix émue : « Abrégez, dit le comte, passez aux conclusions. » À ces mots : trahi les intérêts du roi, il s’écria d’une voix tonnante : Jamais, jamais ! La lecture finie, il se laissa aller contre les juges et les témoins à toutes les injures que peuvent inspirer la rage, la haine, le désespoir. Il se tut enfin, marcha quelques instants d’un air calme, puis, fei-