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tour de lui des regards inquiets. Les soldats s’empressent de le soutenir, lui prodiguent les soins et les égards. Arrivé auprès du chef français, le vieillard s’agenouille et lui présente l’enfant, avec ces paroles : « C’est le sang de Rangaroo, que j’ai sauvé malgré son père. » Une émotion plus douce s’empare des spectateurs de cette scène, comme si le salut de cet enfant était une compensation à tant d’autres calamités. Bussy s’était retiré dans sa tente ; ayant appris ce qui s’était passé à Bobilé, il n’avait pas voulu y pénétrer. L’enfant lui fut porté ; il le reçut comme aurait pu faire le tuteur le mieux disposé, et fit sur-le-champ préparer des patentes qui l’instituaient suzerain des terres qu’il avait offertes à son père. Il lui donna en outre une garde pour le défendre au besoin contre les entreprises de Vizeramrause.

Cependant quatre des compagnons de Rangaroo, témoins de sa chute, s’étaient juré de ne pas mourir avant de l’avoir vengé. Ils se retirèrent aussitôt de la mêlée, et se cachèrent dans un endroit obscur du fort ; comme ils parlaient la même langue que les soldats de Vizeramrause, il leur fut facile de se mêler plus tard à ces derniers, puis de gagner les bois voisins sans avoir été remarqués. Ils y demeurèrent deux jours entiers, occupés de leurs desseins. La troisième nuit, deux de ces fugitifs se mêlent de nouveau aux soldats de Vizeramrause, et parviennent jusque dans le voisinage de sa tente ; se traînant alors sur le ventre, ils réussissent à